dimanche 3 mai 2009

Mr & Mme LaoZi, restauration à domicile

Jeudi soir après avoir colmaté la fuite du siphon et grillé quatre ou cinq double hapiness en buvant un café, LaoZi a dit: "GanLanShu ne mange pas assez, dimanche je viendrai vous faire à manger. Hâ, hâ, hâ, hâ dimanche!" Et il est parti…
Depuis, le téléphone a beaucoup sonné pour clarifier l'entreprise: le menu, bien sûr, relativement long à définir, et puis ce que ça nous coûterait aussi, enfin la présence de Mme LaoZi, toujours recluse dans son humiliation. J'ai donc précisé que s'ils ne restaient pas tous les deux pour le déjeuner, c'est qu'ils envisageaient d'empoisonner un étranger et que donc je ne pouvais pas accepter. LaoZi a de l'humour, ce n'est pas la moindre de ses qualités.
Ce midi, nous venons donc de monter un cran supplémentaire sur l'échelle de Wang Fu (dénomination personnelle de ma perception non moins personnelle de l'Eggrégore chinois). Mr & Mme LaoZi sont arrivés comme convenu à onze heures tapantes et se sont mis au boulot en cuisine tandis que Xiangfei poursuivait la correction d'un mémoire de licence et que je pondais un cours de Master. Côte à côte sur le grand double bureau, nous faisions surtout l'effort de ne pas croiser nos regards de peur de ne plus contenir le fou-rire qui menaçait. De temps à autres, LaoZi passait silencieusement déposer un bol de cacahuètes grillées ou un bai ye jie (porc haché enroulé dans une feuille de tofu) à déguster en attendant de passer à table… De quoi faire un savoureux cours métrage auquel bien sûr personne n'aurait cru.
Il était 12h30 quand Chi fan! (à table!) a retenti alors que nous étions toujours sur nos copies… J'ai fait quelques photos de la très belle table qui semblait guetter l'arrivée de cinq ou six invités, puis on s'est installé avec force Hao kan (c'est beau) bientôt suivis d'encore plus de Hao chi (c'est bon) et autres Feichang (super très bon) du même acabit. J'ai quand même dû calmer l'insistance de mon ami en lui rappelant que je n'avais qu'une bouche et, puisqu'il fume en mangeant, ramasser ses filtres consumés pour les mettre dans le cendrier ressorti pour l'occasion. Assez vite calés à grands coups de hong shao rou (lard en sauce et recette préférée de Mao) et autres côtelettes de porc aux fèves, il a bien fallu convenir que nous en aurions pour jusqu'à mercredi en mangeant bien…
Il y avait donc matière à discussion! Notamment à destination de Xiangfei qui, en aucun cas et que ce soit clair, ne saurait rivaliser avec une telle paire de cordon bleu. Stoïque et respectueuse, elle a patiemment écouté et remercié des explications qui ne lui permettraient guère que de faire moins bon que d'habitude. Bref, c'était un dimanche avec les beaux-parents à table!
Nous sommes donc en phase d'adoption inversée. Le fils LaoZi et sa femme sont partis pour le 1er mai visiter les parents de celle-ci qui, de toute façon, ne sait "ni faire à manger, ni recevoir, ni se déplacer chez ses beaux-parents". Alors, maintenant qu'ils ont une voiture… En plus, il n'a même pas eu son bac et… Bon, apparemment, la belle-fille, c'est pas ça!
Et nous y voilà donc en cette fin de repas enfumé avec un LaoZi qui commence à s'impatienter. C'est qu'il en a des questions prétextes à tout un tas de discours d'ordinaire si tristement dépourvus d'auditoire! Il attaque fort aujourd'hui! Ce que je pense de Mao! "Et allez hop, tout le monde à la campaaaagne!" J'ai de plus en plus de mal à prendre ces conversations au sérieux… Je fais un effort: "Quelques voyages au-delà des frontières lui auraient peut-être permis une vision plus élargie de la lutte des classes…" Il éclate de rire, le bougre! "Ça aurait rien changé! Les étrangers, vous vous êtes vraiment fait avoir avec cette histoire de république, de parti, etc. Mao, c'est le descendant de Qin! Tout empereur se bat et asservit ce qui doit l'être pour asseoir son pouvoir! Et le Parti, c'est le descendant de Mao!" Waoh! Peut-être pas le scoop absolu mais une belle fin de déjeuner. Enfin, presque la fin! Entre autres pensées bien à lui, LaoZi estime que l'amitié entre la Chine et la France est due aux Japonais et aux Allemands, "Ce sont eux qui nous ont rapprochés, même si les Japonais ont tué plus de Chinois que les Allemands de Français, dui ve la?" Euh, j'ai pas les chiffres en tête, là… Ce qui ne va sûrement pas l'arrêter! "Mais si, mais si! Le Japon, c'est le tigre de l'Asie comme l'Allemagne est le tigre de l'Europe! La France, c'est un loup alors que la Chine, c'est un buffle!" Bon… Et le rapport entre le loup et le buffle? "Je veux bien un café", répond-il… Ils sont partis un peu avant quatre heures, ce soir, on ne mange pas…

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