mardi 14 avril 2009

Du mauvais esprit des lois

J'ai arrêté de fumer depuis neuf mois et je me demande si je ne suis pas en train de faire une grossesse nerveuse rêvant d'accoucher d'une loi pro-tabac! Ce qui motive ce court billet sur l'esprit des lois, c'est le dernier post de Pierre Assouline relatant une aberration de plus au pays de la Liberté. Dans le cadre d'une exposition à la Cinémathèque consacrée à Tati, l'affichage réservé aux métros et bus lui a retiré sa pipe! Mr Hulot sans sa pipe! Il y a quelques années déjà, la clope de Lucky Luke était partie en fumée pour être remplacée par une brindille. Personnage en évolution essentiellement dévolu à la jeunesse, on pouvait comprendre. Pour ce qui est de Tati, l'affaire est tout autre! Elle se rapproche du timbre Malraux lui aussi privé de son mégot. Hommes de culture, hommes de lettres et d'arts, Tati autant que Malraux sont l'histoire, celle qui s'écrit avec un grand H pour le premier et une minuscule pour le second mais toutes deux relevant de la culture de la Liberté. Nous sommes donc, aussi futilement que ce soit, en train de réécrire l'histoire culturelle de la France en la privant de la liberté d'avoir été ce qu'elle était pour satisfaire à un principe de précaution au regard de la loi Evin. Quand le ridicule atteint la stratosphère, la contradiction perce la couche d'ozone! Tout à fait par hasard, j'ai vu hier une émission TV d'octobre 2008, Ce soir ou jamais, consacrée aux lois mémorielles, soit l'histoire officielle de la France selon l'Assemblée nationale, désormais interdite de contestation ou de relativisation. Pierre Nora, historien et membre de l'Académie française, en lutte contre ces lois mémorielles et grand défenseur de la liberté de l'Histoire, était opposé à Christiane Tobira, à l'origine du texte de loi qualifiant la traite négrière de crime contre l'humanité. Bien entendu, Pierre Nora ne s'oppose en rien à la reconnaissance de l'atrocité de la traite négrière. Alors de quoi s'agissait-il exactement? Ni plus ni moins de liberté d'expression. Spécialité française qui peut parler de colonisation positive (sic) ou encore mettre quarante ans à transformer la terminologie événements d'Algérie en guerre d'indépendance mais interdit et condamne (loi Gayssot) le révisionnisme patenté d'un Faurisson. C'est là où intervient le concept de liberté au sens le plus large. On se souvient du soutien de principe de Noam Chomsky (Juif dont la famille a été déportée et exterminée dans les chambres à gaz par les nazis) à ce même Faurisson et de la brouille tenace qui s'ensuivit et tient encore l'intellectuel américain à distance du pré carré des intellos français. Le leitmotiv de Chomsky s'en tient à Voltaire: "Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites mais je mourrais pour que vous puissiez le dire!" La pathologie du négationnisme de Faurisson est avérée, la Shoah est un fait historique incontestable pour tout individu sain d'esprit – à quoi bon prononcer des condamnations? A quoi bon interdire et légiférer, encore et encore? Il est question selon Pierre Nora d'étendre la notion moderne de crime contre l'humanité aux guerres vendéennes, à la Saint-Barthélemy, et pourquoi pas aux Croisades, et donc selon ces projets de lois, de se retrouver en position de délinquant au moment de discuter de ces faits historiques, de revisiter leur interprétation. La notion d'État de droit prend ici des allures inquiétantes! Il est bien davantage question de la fabrique du consentement, autre mise à jour lumineuse de nos démocraties par le même Chomsky. A n'en pas douter, la cohérence du législateur va condamner les auteurs de la promotion de l'expo Tati et les responsables de la RATP pour révisionnisme culturel! A moins bien sûr que ces mêmes promoteurs culturels n'aient le droit de dire qu'Hiroshima n'était qu'un pétard à mèche lancé d'un deltaplane…

2 commentaires:

  1. A chacun son "Jour de fête".

    Alors, de cinq à Séte, en guise d'exorcisme face à ces tenants du "casse-pipe Show", vais du coup, "sur mon pédalo sur la vague en rêvant", sans mégoter, m'en craquer une! ... une de "la mauvaise herbe" ... pour que, définitivement?!..., leurs "volutes partent en fumée".

    Alea jacta est !

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