mercredi 25 mars 2009

Mondialisation ou globalisation, c'est toute la question

On pourrait lancer un grand concours photo qui présenterait différents centres urbains du monde rendus totalement anonymes, inidentifiables, par la globalisation. Hormis ceux qui passent régulièrement par Huai Hai zhong lu/Shanxi nan lu, qui peut dire où cette photo a été prise? Italie, France, Mexique, Russie, Corée du sud? Certes, l'angle naturel de vision est plus large que cette photo (1) mais celle-ci est tout de même plus grande qu'un timbre-poste! Et il faut très largement agrandir le cadre pour retrouver la Chine et Shanghai (4)…
Et il ne s'agit aucunement d'une spécificité shanghaienne! Le monde est désormais globalisé au détriment des cultures rangées au rayon folklore et tradition. On ne s'étonnera donc pas d'un très net regain des conservatismes… L'équilibre du déséquilibre est à ce prix. Les équipementiers sportifs mènent la danse et leur grand-messe olympique tous les quatre ans n'est même pas le moment de s'interroger sur cette globalisation de l'image, du vêtement, du désir, sans la moindre considération pour les cultures spécifiques. S'il s'agissait de mondialisation, les signaux conserveraient leur identité!
Par mondialisation, nous pourrions imaginer une translation généralisée des savoirs et des connaissances, un partage multidirectionnel des spécificités, rendus possibles par les échanges commerciaux dont profite, dans tous les sens du terme, l'homo modernicus. Tout au contraire, l'agressivité du marché et de sa communication est telle que même un autiste comprend que de mondialisation il n'y a et n'y aura pas. Nous vivons une situation inédite: le monde est peuplé d'un peu plus de 6 milliards d'individus, dont 5,5 de faux américains! La culture globale est celle de la NBA et de L'Oréal! Dans le même temps, l'usine du monde qui fabrique les biens de consommation assurant le règne de la globalisation est en Chine. Et cette Chine, bien heureuse et on peut le comprendre d'enfin tirer les marrons du feu, ne produit ni ne propose pas grand chose d'un point de vue culturel et contemporain qui puisse nourrir, alimenter, culturellement le monde. Le marché est roi, vampire, une hydre tentaculaire qui phagocyte les consciences dans un maelström indifférencié où l'identité se perd, se réduit à un code barre égaré dans l'interminable liste des angoisses existentielles savamment utilisées par la publicité. Et ce ne sont pas nos gesticulations nationalistes compensatrices de l'égarement qui nous ramèneront sur le chemin de la raison.
Il serait grand temps de produire du sens mais il semble que la manipulation globale du phénomène crise nous éloigne encore davantage de ce genre de considération. La peur est instillée dans tous les discours, les prétextes à stigmatiser l'autre en tant que responsable de tous nos maux se multiplient jusqu'au délire. Hier soir, j'ai répondu jusque très tard aux commentaires d'un article de rue89 évoquant un possible boycott des entreprises françaises par Beijing… Ces crispations réciproques proviennent directement du cauchemar de la globalisation. La mondialisation, au contraire, créerait une dynamique culturelle déterminant des équilibres conjoncturels, à l'opposé des fantasmes paranoïaques qui pullulent dans la jungle globale.

http://www.rue89.com/chinatown/2009/03/24/pekin-a-t-il-decide-un-boycott-des-entreprises-francaises

Photos: O.D.

11 commentaires:

  1. Sujet fort passionnant, mais j'ai bien peur que si le débat devait avoir lieu, il ne soit circonscrit qu'aux seuls locuteurs français, non pas pour des raisons linguistiques mais pour de fondamentales raisons sémantiques dû à des sensibilités bien distinctes qui opposent les "to be" aux "to have".

    En effet, le concept bien spécifique de la "mondialiasition" tel que vous le décrivez n'a pas de traduction en anglais, du moins je n'en ai pas trouvé, pour le distinguer de la globalization, ce qui signifierait en creux que la mondialisation dans la culture anglo-saxonne n'a pas de sens puisque le seul domaine digne d'intérêt est celui de l'Economique et lui seul, "le reste n'étant qu'amuse-gueules".

    Voir la définition de la mondialisation sur
    http://fr.wikipedia.org/wiki/mondialisation

    Et, comme vous le précisez:
    "Nous vivons une situation inédite: le monde est peuplé d'un peu plus de 6 milliards d'individus, dont 5,5 de faux américains!"
    Donc, au mieux c'est un peu plus de 500.000 individus qui pourraient être sensibilisés à donner du contenu à cette mondialisation que vous appelez de vos voeux.
    Un débat qui concernerait moins de 10% de la population mondiale sachant que parmi les 90% tenant du "to have", 20% sont des nouveaux venus, nouveaux addicts forcenés qui dans le processus de l'américanisation de la pensée ont dépassé le maître.
    Pot de terre contre pot de fer.
    L'affaire est définitivement entendue.
    Certaines et certains se réjouissent de la crise comme si elle allait réveiller les consciences non elle ne réveillera que les peurs et les crispations et non l'intelligence.

    Quant au protectionisme souvent décrié, il est le prolongement d'une telle situation pour sauvegarder les plus démunis d'entre nous, il n'a de sens, bien sûr, que dans le périmètre européen.
    Au delà de cette sauvegarde pour la survie des êtres et du mode de civilisation, il conduira à une réflexion qui devrait conduire à une regénérence, à une renaissance de notre civilsation où la qualité doit toujours primer sur la quantité0
    En d'autres termes, dans un tel contexte de rapport de forces je ne peux pas devenir un adepte de la "mondialisation" qui ne se distingue pas de la "globalisation". Ce n'est n'est qu'une illusion voire un leurre de plus ne pouvant conduire qu'à un nivellement par le bas des consciences déjà bien en cours.
    Seule l'Europe pouvait (et pourrait) être la base d'un renouveau salutaire mais 20 ans de libéralisme cautionné par tous à conduit à sa mort clinique.
    Alors oui au protectionisme européen qui devrait à moyen terme créé une Europe des Nations sur un nouveau socle social fondateur danslesquels les Européens se reconnaîtront qui permettra alors à l'Europe d'être le contre poids à la marchandisation sino-américaine du monde et des êtres.

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  2. rectificatif: il faut lire 500 millions d'individus ...bien sûr et non pas 500.000

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  3. Se moderniser n'est pas s'occidentaliser. Le problème est ailleurs.

    Vous évoquez dans l'article, la Raison. Parfaitement : a-t-on une interprétation concrète, universelle et acceptée et tous de la Raison ?

    Ne devrions nous considérer plus l'approche par "complémentarité" que par "opposition" ?

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  4. J'ai l'impression que nous disons la même chose, non?

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  5. Oui. Je voulais justement mettre l'accent sur discussion et non sur dispute, comme ce qui se passe sur la Rue89 et plus généralement en France ou il y a un monde "a part", anachronique, s'arc-boutant sur une interprétation eurocentrique de l'universalisme.

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  6. Je crois qu'il faudra beaucoup d'efforts pour parvenir à ces discussions apaisées, c'est à dire dans le respect mutuel des différences... Et je crois surtout qu'il est urgent d'insister sur mutuel. Eurocentrisme répond à Zhonguo, non? Inutile de se demander si c'est bien ou mal, c'est! Et c'est donc à partir de ces caractéristiques réciproques qu'il faut apprendre à se parler...

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  7. Parfaitement, c'est le mot le respect mutuel. Il n'est pas aisé de changer la mentalité, d'un côté comme de l'autre. C'est un travail dans la durée. Je vous salue pour l'effort fait dans ce sens, notamment à travers ce blog.

    Bonne continuation.

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  8. à Ganlanshu:
    Quels sont vos critères pour évaluer "5,5 milliards de faux américains" et où les localisez vous prioritairement?

    à Anonyme:
    A votre avis, la "complémentarité" est-elle envisageable, même là où "la Raison" , au sens "Rationnel", n'est pas une des bases culturelles?

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  9. @ Pekin moyen,

    C'est où, ce "là" ?

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  10. @Anonyme:
    Vous ne seriez pas "anonymement" jésuite, vous?
    Las, je vous laisse définitivement, "là"... sur l'air de tra la la ...

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  11. @ Pekin moyen,

    Vous voyez qu'il y a des cultures dont les bases ne sont pas rationnelles. Mais je n'en vois pas dans les civilisations vivantes d'aujourd'hui. Des contradictions existent dans toutes les cultures, est ce pour autant, les contradictions des autres sont de l'ordre de l'irrationnel ?
    C'est pour ca que je vous demande de m'eclairer.

    Anonymement Jésuite, peut-être ; ni Dieu ni Maître, sans doute. Est ce là, l'importance ?

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